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L'étape préliminaire d'une fouille programmée peut être la photographie aérienne : on décide de fouiller à un endroit précis suite aux relevés faits par avion et/ou grâce à la prospection à pied, le relevé direct de vestiges archéologiques à la surface du sol laissant présager un site archéologique intéressant.
Mais le plus souvent ce sont des fouilles d'urgence ou des fouilles préventives qui sont menées, dans ces cas, la photographie aérienne est rarement utilisée.
Prenons l'exemple d'un centre-ville dans lequel des travaux d'aménagement sont prévus.
En commençant à creuser, les engins de terrassement mettent à jour par accident des vestiges, les travaux sont donc stoppés et des archéologues sont appelés pour faire une estimation du site. Pour prendre un exemple concret, toujours à Alexandrie, ville côtière du nord de l'Égypte, au cours de la construction d'un pont pour relier l'autoroute à l'un des ports de la ville, de nombreuses tombes ont été mises à jour de cette façon. Les travaux ont donc été stoppés et les autorités égyptiennes ont confié la fouille du site au Centre d'Études Alexandrines dirigé par Jean-Yves Empereur.
Notre site archéologique fictif
La surface du site peut être déterminée en fonction de plusieurs facteurs, tels que : la végétation, les voies de circulation existantes (des routes, un chemin de fer), la présence de cours d'eau, le temps imparti à la fouille (on ne fouille pas de la même manière si on dispose d'un mois ou de six mois).
Mise en place du carroyage
L'étape suivante est la mise en place d'un carroyage par des arpenteurs / géomètres ou par un archéologue lui-même s'il dispose des connaissances nécessaires.
Un carroyage sert à quadriller la surface du site archéologique à l'aide de cordes et de piquets dans le but de créer des carrés d'égale longueur. Selon le site, les carrés peuvent faire par exemple un mètre sur un mètre ou encore cinq mètres sur cinq mètres, tout dépend du type de fouille et du type de terrain.
Le quadrillage du site est réalisé à partir d'un point témoin (le point 0) qui détermine la hauteur du site par rapport à la mer. Toutes les mesures pour implanter le carroyage seront prises à partir de ce point grâce à un niveau optique ou encore grâce à un théodolite.
Le niveau optique, le théodolite et la mire
Un niveau optique « est un appareil de visée horizontale. La première étape consiste à visser le niveau sur un trépied bien stable au sol. La seconde étape consiste à positionner le niveau à l'horizontale. Le réglage fin s'effectue grâce à trois vis situées sous le niveau optique et le contrôle de l'horizontalité grâce au centrage d'une bulle. »
Un théodolite quant à lui est un appareil plus sophistiqué, il « sert à mesurer les deux angles [...] qui définissent une direction, afin de lever les plans [...]. Un trépied muni d'un niveau à bulle porte deux cercles gradués chacun muni » d'une réglette graduée. Source
Les mesures lues grâce au niveau ou au théodolite sur une règle graduée de 4 mètres de haut appelée une mire.
Une fois le carroyage implanté (le site ressemble alors à un immense damier), les carrés sont nommés avec des lettres et/ou des chiffres, on se trouve dans le carré A5, le A étant la première ligne verticale du carroyage et le 5 la cinquie ligne horizontale du carroyage (ou l'inverse, la règle n'est pas immuable).
En fonction de la nature du site on a pu faire appel à des engins de terrassement pour décaper les premières couches stratigraphiques (avant la pose du carroyage bien sûr), ce qui fait gagner énormément de temps et d'énergie à l'équipe de fouille mais il arrive que la nature du terrain ne s'y prête pas et qu'il s'avère nécessaire de faire la chaîne pour évacuer des quantités de pierres phénoménales accumulées sur un site situé dans la cour d'un château français du XIIIe siècle.
Le carroyage implanté (attention aux pieds qui se prennent dans les fils), les carrés nommés et reconnus par des lettres et des numéros, la fouille en elle-même commencer.
Le décapage stratigraphique
L'étape suivante consiste donc à retirer le sédiment qui compose le terrain : la terre ou encore le sable, par couches successives et régulières. L'outil le plus communément utilisé est la truelle, outil pratique et facilement maniable.
Le décapage est plus ou moins aisé selon la stratigraphie des couches, selon que ces couches seraient régulières ou irrégulières. Les points de repère pour suivre une couche sont la plupart du temps la couleur. La couleur des couches varie en fonction de la nature des sédiments qui les composent, en fonction des vestiges qui s'y trouvent (si la couche contient du charbon de bois elle sera noire, si elle contient des tessons elle pourra avoir pris leur couleur, etc
).
La technique
Le décapage s'effectue par des mouvements réguliers en partant devant soi et en ramenant la terre vers soi. Une petite épaisseur de terre est retirée à chaque passage de la truelle, la terre n'est pas creusée, mais bien décapée.
Le remblai (ce qui compose le sol) est ramassé avec l'aide de petites pelles ou de ramasse- poussières puis il est mis dans des seaux pour être ensuite déversé à l'écart du site. Le remblai pourra alors faire l'objet d'un tamisage selon la nature du site : si la fouille se déroule un site préhistorique de petits éclats de silex ou d'os peuvent par exemple s'y trouver et seront donc mis à jour lors du tamisage. Cette opération consiste à passer la terre dans de grands tamis (des passoires) qui laissent passer les éléments fins (le remblai) mais qui gardent les élément plus gros.
Lors du décapage l'il examine la couche mise à jour si jamais un vestige semble apparaître, si un changement de couleur, un changement de composition de la couche se fait présager. Il arrive couramment de passer des jours et des jours sans rien découvrir, ou encore d'avoir des vestiges qui parcourent son carré et ne plus savoir où en donner de la tête.
La découverte d'un vestige
Si un vestige commence à apparaître, il ne faut pas se mettre à creuser tout autour pour essayer de le dégager tout de suite.
Pourquoi ?
Parce qu'il est impossible à ce stade de savoir si c'est un tesson de poterie de petite taille, si c'est vase en entier, si c'est une tuile de toit, si c'est une épée, bref on ignore la forme, la disposition, la profondeur a laquelle le vestige est enterré, il est donc nécessaire de continuer à décaper.
Une fois que le vestige est prêt à être dégagé le décapage est stoppé car la fouille archéologique est une opération destruction. Il est donc nécessaire de prendre des notes, de prendre des clichés, de mesurer, de dessiner le vestige, bref d'effectuer plusieurs opérations pour garder une trace de ce vestige avant qu'il ne soit retiré du sol.
Opérations avant le prélèvement du vestige
La prise de notes situe l'objet dans son contexte : dans quel type de remblai il se trouve, à quel emplacement du site il a été découvert (dans quel carré, près d'un puit, dans la cour d'une maison, etc
), son état de préservation, une première identification ou une hypothèse d'identification.
La photographie permet de garder une trace de l'objet lors de sa mise à jour. L'aspect de l'objet va être par la suite modifié de par son exposition à l'air, son nettoyage, sa restauration, etc
Près du vestige est placée une petite mire (une règle graduée) pour donner une idée de l'échelle du vestige (une idée de sa taille).
Le dessin du vestige permet quant à lui de garder aussi une trace tangible et au cas où la photographie est ratée, c'est le seul document iconographique qui sera en possession de l'archéologue. Mais le dessin est surtout un « plus », un complément à la photo car il présente des détails que la photo ne permet pas de voir.
Les différentes opérations précédentes sont précieusement notées dans un carnet de fouilles et conservées pour être consultées lors de l'étude en laboratoire des vestiges.
Le prélèvement du vestige
Notre vestige se trouve prêt à être enfin retirer du sol dans lequel il repose depuis des centaines, voire des milliers d'années. En fonction de la nature, et/ou de la taille du vestige, l'opération s'effectue seul ou à plusieurs.
Si plusieurs personnes sont nécessaires, certaines maintiennent l'objet (elles font l'office de remblais) pendant que d'autres prélèvent le vestige et le déposent dans un sac en plastique ou dans un sac en papier selon la nature du vestige (du bois, de l'os, des ossements humains, des tessons de poterie).
Les sacs dans lesquels sont déposés les objets sont numérotés selon le carré d'où le vestige provient (souvenez vous du carré A5 de notre carroyage) et portent la date du prélèvement.
Selon l'importance du site archéologique il peut soit être mis en valeur et intégré aux aménagements pour être montré au public, soit sauvegardé et être enfouit sous les aménagements, soit être détruit par les aménagements.
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